C’est samedi, et vous galopez dans le couchant avec Olivia Wilde. Un
rêve de journaliste cinéma ? Un rêve éveillé, alors. Pour la sortie de
"Cowboys et envahisseurs", où des extraterrestres malfaisants ont la
mauvaise idée de chercher des noises à des cowboys qui ressemblent à
Daniel Craig et Harrison Ford (c’est eux), la Paramount a mis les petits
seaux à popcorn dans les grands, et invité la presse dans un ranch du
Montana. Le film a été tourné à Santa Fe, au Nouveau Mexique, mais
qu’importe.
Olivia Wilde, la nouvelle fiancée de l’Amérique, s’est habillée
pour la circonstance : chemise à carreaux, jeans usés, boots
poussiéreuses, elle semble dans son élément. "J’ai le goût de
l’aventure, et ça me porte vers certains projets, dit-elle. Quand j’ai
lu le scénario de "Cowboys et envahisseurs", je me suis vue à cheval,
une arme à la main, flanquée de James Bond et Indiana Jones… Forcément,
j’ai dit oui ! "
Angelina Jolie a du souci à se faire. La relève est là, et elle a
des yeux de chat, une voix rauque sexy et des mensurations de rêve.
Olivia Wilde est tellement belle qu’on dirait qu’elle a été photoshopée.
La pin-up abonnée aux classements des filles les plus hot de
l’univers, la bombe de "Dr. House" est en train de se tailler une place
au soleil d’Hollywood. Au bulldozer. Hier guerrière toute de cuir
vêtue dans "Tron : l’héritage", aujourd’hui étrangère énigmatique dans
"Cowboys et envahisseurs", demain fiancée de Ryan Reynolds dans la
comédie "Echange standard", Olivia Wilde est partout.
Et n’allez pas la réduire à ses charmes extraterrestres, ou les yeux de
chat se changeront en Winchesters. "En général, les femmes dans les
westerns sont soit de fidèles femmes de fermiers, soit des prostituées
de saloon, fait-elle remarquer. Ella, mon personnage, chevauche d’égale
à égale avec le reste de la bande. Cela dit, elle n’essaie pas de
prouver sa valeur par la force, mais par son intelligence. J’ai toujours
aimé les westerns, mais c’est aux hommes que je m’identifiais : je
voulais être Steve McQueen, ou Clint Eastwood. Du coup, j’avais envie
qu’on crée un personnage dans lequel les filles puissent se reconnaître
: "Cowboys et envahisseurs" n’est pas juste un film de garçons. "
Elle y a veillé. Elle a mis son grain de sel dans le scénario, quitte à
passer pour une emmerdeuse. Elle sait exactement ce qu’elle veut (en
gros, la carrière de Meryl Streep), et comment l’obtenir. "J’essaie de
me diversifier pendant que je suis encore nouvelle, ainsi les gens
m’accepteront plus facilement dans des rôles différents. " Avec
Olivia Wilde, tout est pensé, rien n’est laissé au hasard. Elle a
déjà lancé sa future carrière de réalisatrice en tournant un
court-métrage, "Free Hugs" (Calins gratuits), qu’elle a écrit elle-même.
"Je veux développer mes propres projets, au lieu de me lamenter sur le
manque de rôles intéressants pour les femmes à Hollywood".
Respectueuse de ses aînés, elle ne manque jamais de prendre conseil
auprès d’eux. Et observe que Jeff Bridges et Harrison Ford, ses
partenaires de "Tron : l’héritage" et "Cowboys et envahisseurs", ont
tous deux "une vie, une identité au-delà d’Hollywood. Jeff est un
musicien, un bouddhiste, un père de famille, un activiste. Harrison
aussi est un père de famille, et un cavalier, et un charpentier.
Beaucoup d’acteurs finissent malheureux car ils deviennent en quelque
sorte les brisures des personnages qu’ils interprètent ; Harrison, lui,
pourrait fabriquer des meubles dans son appentis, et ce serait le même
gars."
Issue d’une famille de journalistes, élevée entre l’Irlande de son père
et Washington D.C., façonnée dans les meilleures écoles privées de la
côte est, elle parle comme un livre, ne dit pas de mal de ses collègues,
soutient Obama, lève des fonds pour Haïti. Si on chipotait, on dirait
que tout ça manque un peu de spontanéité. Olivia, au fond, est une bonne
élève. Le genre qui apprend vite. Très vite. A 27 ans, elle possède déjà
une maturité impressionnante. Mais il lui manque encore un grain de
folie pour détrôner la reine Jolie. Elle-même rigole en se revoyant,
enfant, entretenir ses parents de sa future carrière d’actrice avec le
plus grand sérieux. Précoce, elle quitte le nid à 14 ans pour aller à
l’internat à Boston. Se marie à 19 avec un prince italien dans un bus
scolaire abandonné (et divorce en février dernier). Prend un nom de
scène en forme d’hommage à son compatriote d’Oscar Wilde. Elle fait ses
débuts d’actrice en 2003, dans des séries télé comme "Skin" ou "Newport
Beach". La voici aujourd’hui aux portes de la gloire.
Olivia Wilde garde la tête froide. Sur « Cowboys et envahisseurs »,
elle a tenu à effectuer ses propres cascades, notamment lors de
cette scène où, en plein galop, elle se voit arrachée à son cheval par
un alien qui l’emporte avec lui dans ses serres. "Suspendue par des
câbles à 12 mètres de hauteur, j’ai pris du recul, raconte-t-elle. Je
regardais notre petit plateau de tournage, coincé entre ces canyons, ces
montagnes... Nous n’étions plus que des fourmis qui avions acheminé tout
ce matériel au milieu de nulle part pour raconter une histoire. Cet
effort herculéen, pour créer quelque chose d’artistique… C’est beau,
quand même."
Olivier Bonnard, envoyé spécial à Missoula - le Nouvel Observateur
"Cowboys et envahisseurs", de Jon Favreau. Sortie le 24 août. |